Bible et liturgie : l’ABC des lectures dominicales
Les lectures bibliques de la liturgie dominicale ont leur « ABC ». Trois lettres qui désignent la répartition des lectures selon un cycle de trois ans. Chaque année, un des trois évangiles synoptiques est privilégié. L’année A est consacrée à l’évangile selon Matthieu ; l’évangile selon Marc est lu durant l’année B et l’année C donne la priorité à Luc. L’évangile de Marc étant plus court que les autres, des extraits de l’évangile de Jean complètent les lectures de l’année B. Le quatrième évangile fournit également chaque année des textes durant le carême et lors des fêtes. Au total, en l’espace de trois ans, pratiquement l’ensemble des évangiles est donné à entendre à l’assemblée dominicale.
Le remplacement du cycle annuel, en vigueur avant le concile Vatican II, par un cycle de trois ans répondait au souhait des pères conciliaires de faire accéder les fidèles à une meilleure connaissance de la Bible. Il a permis une augmentation considérable de la sélection des textes. Ainsi, ce qui est vrai pour les évangiles, l’est également pour les épîtres qui sont lues de manière continue dans leur quasi-totalité au fil des trois années. Les Actes des Apôtres ne sont pas oubliés. Un certain nombre d’extraits en est proposé en première lecture durant le temps pascal. Seul le livre de l’Apocalypse n’est représenté que par quelques passages. L’augmentation la plus impressionnante par rapport à la situation antérieure concerne le Premier Testament qui a vu passer sa présence dans la liturgie dominicale de sept à cent septante et un extraits.
Des points de vue multiples sur Jésus
Le progrès réalisé grâce à la réforme de Vatican II n’est cependant pas que quantitatif. La lecture continue des évangiles permet de découvrir le récit de la vie et de l’œuvre de Jésus selon le point de vue de chacun des évangélistes. En effet, si chacun raconte la même histoire, il le fait selon sa propre sensibilité et en fonction des communautés auxquelles les récits étaient destinés.
Certes, la simple écoute, sans avoir les textes sous les yeux, ne permet sans doute pas de retenir d’une année à l’autre, les différences de détails. Mais un auditeur attentif peut se rendre compte que certains récits sont uniques, que d’autres sont connus par deux ou par trois versions. Par exemple, le récit de la Nativité, propre à Luc, revient chaque année lors de la messe de la nuit de Noël. Celui du lavement des pieds ne se trouve qu’en Jean et est lu chaque année le jeudi saint. Les Béatitudes, qui ne se rencontrent qu’en Matthieu et Luc, sont lues les années A et C, mais aussi dans leur version matthéenne, chaque année à la Toussaint.
Enfin, d’autres récits existent en quatre versions. C’est le cas notamment du récit de la Passion. Il est lu deux fois chaque année : le dimanche des Rameaux et de la Passion selon l’évangile de l’année et le vendredi saint dans la version johannique.
« Et vous, qui dites-vous que je suis ? »
Entendre la Parole de Jésus à travers quatre témoignages différents est une richesse. La lecture continue des évangiles nous enseigne qu’il n’y a pas qu’une façon de parler de Jésus. Elle nous invite à réfléchir à la question qui surgit dès le début de l’évangile de Marc : « Qu’est-ce que cela ? voilà un enseignement nouveau, proclamé avec autorité ! » (Mc 1,27 ; 4e dimanche de l’année B). Elle nous montre, au fil des récits, comment les premiers disciples y ont répondu. D’année en année, elle nous confronte également à la question posée par Jésus à ses disciples : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? (Mt 16,15 ; Mc 8,29 ; Lc 9,20). A travers la proclamation liturgique de l’évangile, nous devenons nous aussi les destinataires de l’interpellation.
Marie-Elisabeth Kiessel